Rédactions en partant d’une photo

En début d’année, les élèves durent écrire une nouvelle en s’inspirant d’une photo:

Vous pourrez lire dans cet article le texte de Chiara et celui de Clelia & Asya.

It’s raining cats and dogs (Chiara)

L’agent Cavalleri rejoignit son coéquipier vers la petite chapelle qui surplombait la colline. Elle était trempée, et il pleuvait des cordes à l’extérieur. Son collègue lui expliqua brièvement la situation et la jeune femme se mit tout de suite au travail. Elle voulait en finir au plus vite avec cette affaire. Jamais elle n’avait eu à faire à un criminel pareil et elle se réjouissait de pouvoir l’arrêter. Elle n’exerçait pas son métier depuis longtemps et jusqu’ici, les quelques dossiers qu’on lui avait confiés s’étaient soldés par des échecs.

La jeune policière entra. La scientifique était déjà présente, observant le corps et en tirant toutes les conclusions possibles sans déplacer le cadavre. Ses collègues photographiaient la scène sous tous les angles, n’omettant aucune trace de sang, aucun débris de cervelle.

L’agent regarda la scène avec froideur, ses cheveux gouttant sur le sol. La victime avait beau avoir à peine une dizaine d’années, elle savait très bien que si elle laissait le dégoût et la tristesse prendre le dessus, elle serait inapte à mener son enquête jusqu’au bout. Elle se tourna vers sa collègue — une petite Asiatique avec de magnifiques yeux noirs — et lui demanda ce qu’elle pouvait lui apprendre :

– La mort remonte à environ trois quatre heures, je ne peux pas être plus précise. Le tueur devait se trouver à l’entrée de la chapelle, là-bas au fond, indiqua-t-elle en pointant l’arrière de la petite église. La victime s’est précipitée vers l’autel, sûrement en passant par la nef, avant de se faire exploser la cervelle.

Lorelei Cavalleri acquiesça. Elle s’approcha ensuite de l’entrée, se pencha légèrement et remarqua une empreinte. Elle appela un de ses collègues — Matthieu, Matthew, quelque chose dans le genre — pour lui demander de faire un moulage et de photographier l’endroit au plus vite.

Estimant que son travail était fini et qu’elle ne serait plus d’aucune utilité, elle quitta la petite chapelle pour retourner au poste, bravant à nouveau l’averse qui faisait rage. Arrivée à destination, elle rejoignit son coéquipier qui avait déjà établi la liste des suspects. Ils étaient au nombre de trois. Ethan — son « cher » binôme — entreprit de lui expliquer :

– La scientifique a enfin pu identifier le corps. Il s’agit de ce cher et regretté Tommy.

Lorelei hocha la tête. Dans un petit village qui devait compter à peine cent cinquante habitants, tout le monde connaissait tout le monde.

– Vu la maison dans laquelle il habitait, je pense plutôt que cet acte vise à blesser et déstabiliser Mme Fitzgerald. Après tout, son chouchou n’avait aucune raison de se faire descendre, il n’avait aucun ennemi ; en revanche, la patronne est plutôt du genre à se faire remarquer.

Cavalleri réfléchit un peu avant de répondre :

– C’est sûr qu’à part quelques chats de gouttière, Tommy n’était pas du genre à s’attirer des ennuis. Il passait son temps au manoir. La vieille mégère, en revanche, est plutôt têtue et tout le monde ne la porte pas dans son cœur.

Ethan enchaîna :

– C’est exactement ce que je me suis dit. Alors, en rentrant, je suis allé lui rendre une petite visite. Et je suis reparti avec trois suspects. Henry Monnot, Evelyn Johns et pour finir, Marc Fitzgerald lui-même.

– Et par qui voudrais-tu commencer ?

– Henry Monnot. Ethan Ferreira gara la voiture devant la maison du libraire. Sa collègue s’avança et alla toquer à la porte, priant pour que le vieux les sauve au plus vite de l’eau glacée qui tombait. Quelques secondes plus tard, la porte s’ouvrit sur Henry Monnot. Les deux agents lui montrèrent leur plaque et il les laissa rentrer en grommelant :

– Je suis vieux, ça veut pas dire que j’ai Alzheimer. Je sais encore qui vous êtes…

L’agent Ferreira dissimula un sourire avant de se tourner vers le suspect pour lui poser quelques questions.

Les policiers ressortirent de la minuscule maison dépités. Leur principal suspect avait un alibi qui venait d’être confirmé par son médecin, lorsque celui-ci était apparu pour sa visite hebdomadaire ; il y a quelques heures, ne supportant plus ses douleurs, Monnot s’était rendu chez lui, après quoi il était rentré. Le meurtre avait déjà eu lieu. Ils entrèrent dans la voiture, répandant l’eau qui imbibait leurs habits sur les sièges et Ethan lâcha en soupirant :

– C’était un suspect parfait. Il la déteste tellement !

Lorelei acquiesça et Ethan les conduisit jusque chez Evelyn Johns. Le même processus se répéta, mais personne ne vint leur ouvrir. Ils firent le tour de la maison et constatèrent que tout était fermé. Voulant éviter de se mouiller encore plus, ils décidèrent de s’en aller. Une jeune fille les interpella et leur dit :

– Si c’est Johns que vous cherchez, elle s’est barrée il y a deux jours.

Puis elle s’empressa de rentrer dans sa maison. Les deux policiers regagnèrent la voiture, les habits et les cheveux dégoulinants d’eau. Ils se dirigèrent vers le manoir Fitzgerald.

L’agent Cavalleri appuya sur la sonnette et la servante — Carla Benson, si ses souvenirs étaient bons — vint les accueillirent. Elle les fit entrer et les installa dans le salon. Elle leur servit à boire, leur donna deux linges pour qu’ils puissent se sécher et les informa que son patron allait arriver d’une minute à l’autre avant de se retirer.

Léonard Fitzgerald entra dans la salle et leur serra la main avant d’engager la conversation :

– Bonjour, ma femme m’a informé de la terrible nouvelle. Je suis sincèrement navré, mais je dois avouer que je ne comprends pas vraiment votre présence ici.

– M. Fitzgerald, annonça Lorelei, vous êtes un suspect potentiel dans cette affaire. En conséquence, nous aimerions vous poser quelques questions.

– Eh bien allez-y, leur lança-t-il avec mépris.

Ethan déglutit et la jeune femme décida de mener l’interrogatoire. Son coéquipier n’en menait pas large et il fallait que quelqu’un remette — au moins une fois dans sa vie — cet homme — qui croyait que tout lui était dû — à sa place.

– Où étiez-vous aujourd’hui ?

– Chez moi. Toute la journée, insista-t-il.

– Votre femme était-elle présente ?

– Oui. Pourquoi ?

Ethan continua :

– Je lui ai rendu visite un peu plus tôt et elle m’a bien précisé qu’à l’heure du meurtre vous n’étiez pas ici. Pourriez-vous l’appeler pour qu’elle confirme votre alibi. Contrairement à vous, je la crois quand elle dit qu’elle n’a pas bougé de chez elle.

Au même moment, Mme Fitzgerald fit son entrée. Elle était vêtue d’une robe bordeaux qui touchait le sol. Elle était parfaitement coiffée et ressemblait à une mannequin malgré son âge. Elle portait des talons qui devaient bien faire douze centimètres et dominait toutes les personnes présentes dans la salle. Elle se dirigea vers son mari, se baissa lentement pour être à sa hauteur et articula d’une voix à refroidir un volcan :

– Je sais que c’est toi. Tu as tué celui que je considérais comme mon fils, et tu vas payer. Si tu ne veux pas te retrouver à la porte et fauché dans la minute qui suit, tu as plutôt intérêt à avouer. Tout de suite !

Léonard Fitzgerald pâlit brusquement devant la menace. Elisabeth Fitzgerald pouvait se montrer plus qu’impressionnante et il était à deux doigts de perdre son sang-froid. Il sentit sa gorge se nouer et ses yeux s’humidifier. Il releva la tête et annonça :

– Oui, j’ai tiré sur Tommy. Je n’en pouvais plus de ce foutu chat ! Tommy par-ci, Tommy par-là ! J’avais atteint mes limites ! Mais pour tout te dire…

Le téléphone d’Ethan résonna dans l’immense salon, la sonnerie se répercutant sur les murs.

– Allo ? Oui, d’accord. Merci pour l’information. Ethan raccrocha avant de se tourner vers les personnes présentes dans la salle :

– M. Fitzgerald, vos empreintes ont été retrouvées sur le corps de Tommy.

Elisabeth se tourna vers son mari, le gifla, et s’écroula en pleurs, réalisant enfin que son bébé, son compagnon pour toutes ses années, son chat, était mort.

 

Noir sur blanc (Clelia & Asya)

Une pluie torrentielle s’abattait sur Joseph, tandis que les vagues s’écrasaient contre la falaise où se tenait une chapelle dans laquelle Joseph entra. Il y découvrit un prêtre agenouillé près de la croix. Il était tout le contraire de Joseph : noir de peau, il n’avait pas de cheveux sur son crâne bosselé et ses yeux étaient d’un vert qu’on pourrait croire sorti des forêts. Alors que Joseph, lui, était blond et ses yeux étaient d’un bleu limpide tout comme ceux de sa famille et de celle de sa femme.

– Bonjour, ô mon père ! Si je suis venu ici, c’est à cause de ma femme ; elle est en train d’accoucher ; si nous pouvions prier pour elle… demanda Joseph.

– Mais bien sûr, répondit le prêtre avec un petit sourire, venez prier à mes côtés.

Pendant une heure trente, ils prièrent assidûment. Quand la pluie cessa, Joseph rompit le silence de la prière.

– Merci, mon père, mais je pense qu’il est temps que j’y aille.

– Mais, bien sûr, répondit le prêtre. Allez retrouver votre femme, à la revoyure.

– À la revoyure ! salua Joseph.

Quand Joseph sortit, le soleil était haut dans le ciel et éclairait tout le village en bas de la colline. Joseph prit cela pour un signe et se dépêcha de rentrer. Arrivé chez lui, il découvrit sa femme couchée sur leur lit avec leur bébé dans les bras. Il avait la peau étrangement foncée, de petits cheveux noirs sur le dessus de son crâne et même s’il venait de naître, il avait les yeux d’un vert qu’on pourrait croire sorti des forêts.

Joseph eut la gorge nouée.

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